mardi 26 août 2025

C'était notre Terre, de Kathleen Grissom

  

Deuxième rencontre avec Kathleen Grissom, après «  Les larmes de la liberté », que j’avais chroniqué en 2017 ici. Il s’agissait alors d’un récit passionnant concernant les afro-américains du 19ième siècle.

Avec «  C’était notre Terre », l’auteure nous embarque cette fois au cœur du Peuple Crow, toujours au 19ième siècle, dans le Montana.

L’héroïne dont nous suivons les traces au fil des pages a réellement existé. D’autres personnages ainsi que certains évènements et lieux ont également existé. Il s’agit donc d’une fiction basée sur des faits réels et un fond documenté historique.  

Notre petite indienne, nommée Va-la-Première par son Peuple, va vivre tout un tas d’aventures dans une Amérique changeante, remodelée par les Yeux-Jaunes (les blancs) et dont nous connaissons la malheureuse issue pour les Peuples Amérindiens.

Le récit débute en 1863. Va-la-Première a alors 7 ans, et vit en sécurité auprès de sa mère, de son petit frère et de son père qui est le Chef de leur tribu.

Au fil des pages et des années qui passent, Va-la-Première va voir son mode de vie chamboulé, son destin lié à un Yeux-Jaunes et son nom s’effacer pour devenir Crow Mary.

C’était une femme forte, déterminée, courageuse et fière.

J’ai beaucoup aimé la petite histoire, avec des personnages attachants, une belle écriture et un récit passionnant. J’ai apprécié également la grande histoire, avec des faits et un contexte historique enrichissant.

Comme toujours à travers l’Histoire, les blancs se sont considérés comme étant les plus civilisés et ont regardé avec dédain les mœurs et coutumes des populations autochtones. Relégués au rang de simples «  sauvages », il fallait absolument les éduquer et leur faire adopter le style de vie occidental, à grand renfort de réprimandes, d’injustices et d’extermination.

Les Peuples amérindiens avaient leur propre vision de la vie, des coutumes bien différentes de celles de l’homme blanc. Il y avait aussi de la cruauté et des souffrances, car c’était des Peuples guerriers, mais ils vivaient en bonne harmonie avec la nature, ils avaient une grande spiritualité et certainement bien plus de respect et d’honneur que les Yeux-Jaunes, individus colonisateurs à l’égo surdimensionné. Les maladies, le whisky et les armes à feu sont venus à bout des autochtones et de la faune sauvage, elle aussi exterminée.

Ce qui leur est arrivé laisse un goût amer. Aujourd’hui encore, je pense que leurs conditions de vie dans leurs réserves sont mauvaises. Partout où les Blancs posent leurs valises, l’authenticité originelle est gâchée. Quand atteindrons-nous enfin assez de sagesse pour respecter ce qui n’est pas à notre image ? 

Bonne lecture!

 


 

lundi 23 juin 2025

La servante écarlate, de Margaret Atwood

 

 

Bienvenue en république de Gilead.

Une république que l'on pourrait qualifier de dystopique si elle devait prendre forme dans nos sociétés occidentales.

Dystopique ou pas...

Ce monde imaginé par Margaret Atwood n'est pas un monde farfelu, sans fondements ou qui relève du fantasque ! Ses éléments s'appuient au contraire sur des précédents, dans un passé historique ou un présent contemporain, y compris occidental.

La servante écarlate, personnage central de ce roman, incarnée par Defred, nous entraine au fil des pages dans cette société hyper restrictive, hiérarchisée, où toute liberté semble abolie, sous contrôle.

Un système de castes est mis en place, avec son cortège de règles, de codes vestimentaires et de comportements attendus.

Gare à celui qui tente d'enfreindre la Loi, car les Yeux sont partout et la dénonciation monnaie courante. Chacun essayant de sauver sa peau et de s'auréoler d'obéissance absolue.

Cette Amérique malade, rebaptisée Gilead, agit comme un organisme vivant en voie d'extinction. La chute dramatique de la fécondité, causée par un environnement toxique, a poussé certaines élites à réorganiser entièrement la société, de manière extrême. Le but ultime étant de mettre main basse sur les femmes fertiles et supposées " saines".

Ces femmes sont matées et intégrées au corps des Servantes. Intégralement habillées de rouge et d'une coiffe blanche.

Chacune d'elles est affectée à une maison de Commandant et a pour unique mission d'être engrossée par ce dernier.

Defred, sous son apparente soumission aux règles, nous entraine dans les méandres de ses souvenirs, ses doutes, ses regrets et ses espoirs.

Elle nous offre ainsi quelques bribes de vie de sa jeunesse aux côtés de sa mère, puis de sa vie d'adulte dans une société en plein bouleversements, prémices du grand basculement fatal.

Les libertés individuelles et les droits acquis semblent gravés, mais ils ne le sont que sur des tablettes d'argile. Fragiles, vulnérables, friables et effaçables.

Au nom de la sécurité et de la survie, tout peut être remis en question, justifié et appliqué.

A grand renfort de propagande, de manipulations, de peur habillement distillée, puis finalement de contrôles, de restrictions et surtout de sanctions, et toute une société se soumet. Du moins en grande partie et en apparence, car il subsiste toujours une forme de résistance et de rejet de l'ordre établi...

Ce roman a été publié en 1985 et adapté depuis en séries télévisées.

En 2019, Margaret Atwood nous en a offert une suite : " Les Testaments", qui fera partie de mes prochaines lectures!

 


 

lundi 9 juin 2025

Avant Adam, de Jack London

  

Avant Adam (les demi-hommes), est un très court roman d'aventures de moins de 200 pages qui  date de 1907.

Le narrateur nous explique durant les deux premiers chapitres qu'il fait depuis sa tendre enfance de drôles de rêves, le plus souvent effrayants, dans lesquels il se voit dans la peau d'un personnage d'un autre temps.

Plus que des rêves, il s'agit en fait de "souvenirs" préhistoriques.  Des souvenirs tellement présents qu'il semble les vivre réellement au fil des années, jusqu'à l'âge adulte.

Le narrateur grandit en même temps que son autre lui, cet ancêtre qu'il situera une fois étudiant à l'époque du Pléistocène moyen. Grande-Dent, c'est le nom qu'il s'est attribué.

Les deux premiers chapitres passés, le roman devient beaucoup plus intéressant et distrayant.

On y suit les péripéties de cet être pas tout à fait homme, mais plus vraiment  animal.

Grande-Dent fait en effet partie du Peuple des Cavernes. Lui et sa horde côtoient le Peuple des Arbres, un peu plus primitif qu'eux, mais aussi le redoutable Peuple du Feu!   

Tout au long du récit, Grande-Dent  nous entraine à la suite de ses rencontres, heureuses ou malheureuses. On y goûte un peu de cette vie primitive faite de luttes, de dangers, de fuites, de survie, mais aussi d'amitiés, de rires, de curiosité et d'apprentissages.

Avant Adam est la deuxième œuvre de Jack London qui passe entre mes mains, après l'excellent " Le Vagabond des étoiles" que j'ai lu il y a quelques années en deux tomes.

"Croc-Blanc" sera sans doute ma prochaine rencontre avec cet auteur!

Bonne lecture.

 


 

vendredi 27 septembre 2024

Flush, de Virginia Woolf

 

Biographie de Flush, petit cocker doré, aux côtés de sa maîtresse, Miss Barrett.

C'est un court volume de 136 pages au cours duquel le lecteur est invité dans la vie de Flush, de la grisaille Londonienne au soleil Florentin.

Je trouve que c'est un bel exercice littéraire de se pencher sur le point de vue d'un chien, surtout si l'on considère l'époque à laquelle a vécu Virginia Woolf ( 1882 - 1941). Imaginer son interprétation des évènements qui l'entourent et formuler ses ressentis dans une logique canine.

Ses raisonnements sont forcément quelque peu "humanisés" pour les besoins de l'histoire, mais le tout garde une candeur et une spontanéité attendrissantes.

La vie de Flush se déroulant dans les années 1842 à 1854, le récit s'enrichit donc du contexte sociétal de l'époque, en Angleterre et en Italie.

Ce fut une lecture rapide que j'ai trouvée bien distrayante et pleine de tendresse. A lire entre deux pavés!

 


 

 


lundi 16 septembre 2024

Les voleurs d'innocence , de Sarai Walker

 

Une histoire de femmes dans l'Amérique des années 50.

Des destins de femmes où les hommes ont peu de place sinon pour le tragique.

La famille Chapel compte six enfants, toutes des filles aux doux noms de fleurs.

Le père, Henri, est le digne descendant et Président de la Chapel Firearms. Constructeur d'armes à feu du même nom, tristement célèbre dans toutes les guerres et tous les massacres depuis la conquête de l'Ouest.

La mère, Belinda, énigmatique et tourmentée, est considérée comme folle par son entourage. Incomprise et isolée. Seule Iris, son avant dernière fille de treize ans croira en elle.

Iris, la narratrice, m'a embarquée au fil des pages à travers la vie et la fin des membres de cette famille américaine, à une époque où les femmes n'avaient que le mariage comme horizon. Une époque où la marginalité menait bien souvent à l'internement psychiatrique.

L'ambiance particulière de ce roman, la mystérieuse malédiction qui semble planer sur les membres féminins de cette lignée, l'omniprésence des fleurs, des couleurs, des odeurs, le dessin, la poésie et l'écriture... tout cela m'a accompagnée agréablement durant cet été.

Un roman de presque 600 pages aux éditions Totem que j'ai été heureuse de découvrir.

Bonne lecture!  




mercredi 1 novembre 2023

L'été où tout a fondu, de Tiffany McDaniel

 

L’histoire se passe en 1984, en été, dans une banale petite ville de l’Ohio, aux USA.

Le narrateur, Fielding, un garçon de 13 ans au moment des faits, nous en dresse un charmant portrait, comme tout natif aime parler du lieu qu’il a toujours connu, dans lequel il a grandi et tissé des liens.

Fielding y vit avec sa famille dans une jolie petite maison. Son père, Autopsy Bliss est le procureur de cette ville. Homme singulier, toujours tiré à quatre épingles, a un esprit torturé par la justesse de son métier et le fragile équilibre entre le Bien et le Mal.

Sa mère Stella, riche héritière d’une usine de chaussures, vit recluse dans sa demeure, sans jamais mettre un pied à l’air libre.

Et puis il y a Grand, le grand frère beau, sportif et admiré de tous.

La torpeur de cette petite ville à la routine bien installée va basculer avec la visite du Diable en personne, et avec lui une chape de chaleur épouvantable.

C’est un récit sur la perte.

La perte des êtres chers, ceux qui ont laissé une empreinte durable dans nos vies, bonne ou mauvaise. Mais parfois les deux, comme les faces d’une même pièce.

La perte de la foi, de son innocence, de ses rêves.

La perte de tout ce qui donne un sens à la vie mais la nécessité de continuer malgré tout, de poursuivre son chemin comme une éternité sans fin. Un condamné à perpétuité dans la solitude, avec pour seule compagnie ses souvenirs, ses regrets.

C’est aussi un récit sur l’ambivalence de la nature humaine.

On recherche le Mal chez les autres, à l’extérieur de nous, comme un fautif tout désigné à nos dérives. Alors qu’il se révèle depuis notre puits profond, celui que l’on ne connait pas, jusqu’à ce qu’un évènement traumatisant le fasse surgir comme un diable de sa boite.

Être et paraitre. Ce que l’on est vraiment, ce que l’on aimerait être, ce que les autres aimeraient que l’on soit. La société toute entière projette ses désirs et ses dictats sur chacun d’entre nous.

Tiffany McDaniel a une écriture douce et délicate. Le tragique est présenté sans surenchère dans le drame. Il n’y a pas de volonté de heurter le lecteur. Mais cette lecture m’a tout de même profondément marquée. Elle a raisonné en moi et m’a émue, parfois jusqu’aux larmes.

Je considère ce roman comme mon coup de cœur de cette année. 

Bonne lecture. 

 


lundi 31 octobre 2022

La planète aux embûches, de Clifford D. Simak

 

 

Autant le dire tout de suite, la couverture du livre n’a rien à voir avec le contenu du récit.

Ce roman, paru initialement en 1982 et en 1984 dans sa version française, est assez court, puisqu’il ne compte que 250 pages en format poche. C’est de la science-fiction qui semble assez vieillotte au départ, dans le style et l’ambiance, mais qui a tout de même accroché mon attention dès les premières pages.

Le personnage principal, un Professeur d’université, Edward Lansing, se retrouve propulsé malgré lui dans un monde inconnu, aux côtés d’autres personnages venus d’ailleurs. Tout ce petit monde ignore comment et pourquoi il a été arraché à sa planète d’origine et à son temps pour se retrouver dans ce lieu insolite. Quel est le but de tout ceci ? Est-il seulement possible de faire le voyage de retour ?

Lansing et ses compagnons d’infortune sont aussi différents les uns des autres que peut l’être le panel de l’humanité, tant dans leurs personnalités, leurs métiers, leurs sensibilités ou leur manière d’aborder l’énigme qui se présente à eux à travers ce voyage spatio-temporel. Chacun va d’ailleurs réagir différemment aux embûches de cette planète. Certains y laisseront la vie.

Je n’ai pas pu deviner la finalité de cette histoire jusqu’aux dernières pages.

Étant donné le contexte de ce périple, il est aisé de céder à la panique, au désespoir, de se laisser absorber par le néant… Mais Simak, en grand humaniste, laisse tout de même une porte de sortie à l’être humain, pour peu qu’il se donne les moyens de donner le meilleur de lui-même, d’utiliser son intelligence et sa morale dans un but noble.

J’ai passé un bon moment de lecture, hors du temps, et à l’image des personnages du roman, je me suis sentie désorientée, la tête pleine d’interrogations, essayant de comprendre ou deviner la suite des évènements.

Je me dis que finalement, même si les épreuves de cette planète semblent extrêmes et déstabilisantes, la question du but de nos existences se pose. Nos existences au sens individuel mais aussi et surtout global.

Le schéma d’évolution de l’humanité est-il viable ?

Bonne lecture.