jeudi 19 février 2015

Que ta volonté soit faite, de Maxime Chattam





Le maître du thriller est de retour avec «  le livre au coquelicot ».
Un roman noir qui ne manquera pas d’interpeller le lecteur, dans tous les sens du terme. Un livre au format plus petit et une couverture à fond blanc qui contraste avec tous les autres romans de l’auteur qui ont un manteau sombre.

Le mal est un thème récurrent chez Maxime Chattam, qui en aborde différents aspects dans ses ouvrages. Mais dans le cas présent, je colle une majuscule à ce mot pour écrire «  le Mal ».

Le récit se passe dans une petite ville perdue de l’Amérique profonde, une ville où le temps semble s’écouler plus lentement qu’ailleurs, une ville au goût de poussière….

Les scènes sont brutales, choquantes même, dès les premières pages. Le mal sème ses graines putrides au fil des chapitres et nous laisse une amertume tenace dans la bouche.

Pour rester dans la lignée du contraste évoqué plus haut, le style narratif en est un aussi, ainsi que le dénouement final qui nous oblige à faire un arrêt sur réflexion.

Le Mal peut avoir tellement de visages…. 



samedi 14 février 2015

Le Rouge et le Noir, de Stendhal




Stendhal est incontestablement un écrivain de génie. Il a un sens aigu de l’analyse psychologique fine, aussi bien concernant les sujets masculins que féminins.

Le  héros du récit, Julien Sorel, est un beau jeune homme intelligent qui, par son caractère et ses valeurs morales, n’arrivera jamais à s’intégrer dans aucun groupe. Il poursuivra des rêves de grandeur et vivra un destin bien singulier….

Certains passages du roman m’ont paru longs tant l’auteur détaille et dissèque les émotions des différents protagonistes. Cela est évidemment un mal nécessaire à la bonne compréhension du cheminement mental de chacun, et explique les actions qui s’en suivent !

Au-delà de la trame même du récit, c’est le contexte historique de cette époque du 19ième siècle qu’il est intéressant de connaitre, ainsi que la richesse du vocabulaire employé, et la construction quelque peu « emphatique » des phrases (je n’emploie pas ce terme dans le sens péjoratif, mais disons que ça tranche nettement avec la simplicité dépouillée du style littéraire contemporain).


" Une mouche éphémère naît à neuf heures du matin dans les grands jours d'été, pour mourir à cinq heures du soir; comment comprendrait-elle le mot nuit?"

vendredi 13 février 2015

La passion de l'étanche, de Anne-Laure Chanel





J’ai «  lu »   une fiction radiophonique. Et S’agissant de mon premier contact avec ce style littéraire, j’avoue que ma curiosité a été piquée par ce terme.

Un petit livre de quatre-vingt pages qui n’est que surprises !  Le titre, l’illustration de la couverture et le contenu même de cette fiction semblent ne pas avoir de liens. J’ai bien aimé ce décalage, et l’ambiance « radiophonique » parfaitement rendue.

Impossible de deviner quoi que ce soit concernant le déroulement de l’intrigue, jusqu’au bout !
Et donc, pour ne rien enlever au charme de la découverte, je ne révélerai absolument rien, sinon que j’ai ri en lisant les dernières phrases, tellement l’ensemble de cette œuvre est original !

Bonne lecture.


Pour les curieux, voici la 4ième de couverture:


 Elysée Toupie est thanatopractrice, elle redonne un semblant de vie aux visages des défunts. Quand elle pratique les soins de conservation, elle imagine ce qu'a été la vie de la personne décédée. Tout est matière à inspiration : la forme d un sourcil, d un nez, la couleur d une chevelure... Elle alimente ainsi son livre de bord où elle note toutes ses rencontres avec ses « amis de froid et de silence ». Mais la vie d'Elysée change complètement le jour où elle se trouve devant le corps du romancier à succès Éliphas Sloumévy."...



mercredi 11 février 2015

Chroniques des ombres, de Pierre Bordage

 




Voici un grand roman de science-fiction. Un roman qui dépeint un monde qui pourrait bien nous rattraper, tôt ou tard…

Une catastrophe nucléaire majeure divise la civilisation humaine en deux parties :

Il y a d’une part quelques grandes Cités Unifiées, ultra protégées et bénéficiant des technologies de pointe. Les citoyens y sont confinés mais acceptent de bonne grâce la surveillance, notamment par le biais de biopuces implantées dans leurs cerveaux, au nom de la sécurité.

Et d’un autre côté il y a le Pays horcite, c’est-à-dire le reste de la planète, où les populations sont livrées à elles-mêmes, survivant tant bien que mal dans une nature polluée, dangereuse, mortelle, avec son lot de mutations.

Ces deux mondes ne se côtoient pas, pourtant une vague meurtrière va déferler sur eux, soudaine, mystérieuse, inexplicable.

Complots politiques, manipulations mentales, questionnements, fuites… les assassins de l’ombre vont bouleverser l’ordre établi et obliger l’humanité à se regarder en face.

750 pages qui se dévorent avec passion. Une très belle histoire qui met en avant ce qui fait de nous des êtres humains, dans ce qu'il y a de plus sombre, de profondément enfoui et inavouable, ou au contraire dans certaines valeurs nobles, et notre force à puiser dans cette énergie qui nous anime et nous pousse à avancer main dans la main.


Citations des ombres: 


* Quand la vie te conduit dans des impasses, elle s'arrange toujours pour te proposer des sorties.
Proverbe horcite des bordes de la mer Méditerranée.


* Pire que la plus féroce des bêtes sauvages est l'homme qui, sous couvert de religion, exhorte les imbéciles à massacrer, torturer ou exploiter leurs frères humains.
Proverbe horcite de la région de Tchon. 


*  Nous nous prétendons civilisés. Mais laissez aux citadins la possibilité de libérer leurs instincts, et vous verrez à quelle vitesse craque le vernis de la civilisation.
En réalité, nous n'avons jamais réussi à dompter l'animal en nous. Je dirais même que plus on essaie de rétrécir sa cage, et plus l'animal devient féroce.
Arthus Baulstein, Précis psychanalytique de la Cité Unifiée 


*  La liberté est un bien précieux, un diamant, mais les différentes couches dont nous l'avons enveloppée l'empêche de briller.
Maintenant il nous faut retrouver son éclat en nous débarrassant sans pitié de nos terreurs, de nos certitudes, de nos réflexes et de nos insuffisances.
Josep Blotar, De la vie en Cité Unifiée. 


lundi 9 février 2015

La méditation m'a sauvé, de Phakyab Rinpoché et Sofia Stril-Rever

 




Voici une biographie que l’on pourrait qualifier à la fois de banale et de singulière.
Banale car les grandes lignes de la vie de ce moine bouddhiste tibétain ressemblent à tant d’autres de ses compatriotes, obligés de fuir leur pays natal afin d’échapper à l’étau de la police chinoise, contraints de s’exiler dans cet ailleurs qui leur est totalement étranger, à tout point de vue.
Singulière car son destin a été marqué par la guérison exceptionnelle de son corps meurtri et condamné par la médecine occidentale.


Yeshi Dorjé est né le 24 juin 1966 dans la vallée du Nyagchu, au Tibet. Il est la huitième incarnation de Phakyab Rinpoché.
Son témoignage a été recueilli par Sonia Stril-Rever, qui est la biographe du Dalaï-lama et enseigne également la méditation et le mantra yoga.  
Phakyab Rinpoché va retracer avec elle le chemin de sa vie, en alternant le récit de certains moments de son enfance avec ceux de l’âge adulte, en tant que moine, abbé, prisonnier et enfin exilé.

Il décrit ainsi certaines anecdotes et scènes de vie des habitants de sa région natale, le Kham. On y goûte l’immensité et la pureté de cette nature majestueuse du pays des neiges, mais aussi la dureté de la vie et sa rusticité.

« Les yaks m’ont enseigné le don de soi, la confiance, le dévouement, la patience, la résistance. »

La connaissance de ce passé est importante car elle aide à la compréhension de ce qui a nourri l’enfant qu’il était, son désir de s’engager sur la voie de Bouddha, son vœu de donner sa vie en offrande à tous les êtres en étant moine.

« J’ai connu cette époque où la nature, tout en prodiguant à nos corps la nourriture nécessaire, communiquait aussi à nos esprits une confiance illimitée. Elle nous ancrait dans une énergie d’abondance et de renouvellement. Démunis sans éprouver ni manque ni frustration, nous étions riches de chaque journée, comblés de la beauté inépuisable des êtres et du monde. »



Différents évènements l’ont conduit ensuite, comme tant d’autres, à être arrêté, emprisonné et torturé pendant 3 mois par la police chinoise. Puis une évasion providentielle a permis son exil aux Etats-Unis. Tout cela est conté avec beaucoup de pudeur, de simplicité et surtout sur un ton dépourvu de colère, de haine ou de soif de vengeance.
Ce qui ressort de ce témoignage, de cette biographie tellement touchante, est un message d’amour et de compassion universelle.

Phakyab Rinpoché a dû affronter, en arrivant sur le sol américain, une dégradation importante de son état de santé, conséquence de son arrestation et emprisonnement…une cheville mal soignée atteinte d’une gangrène, ainsi qu’une tuberculose osseuse qui a peu à peu détruit sa colonne vertébrale, sans parler des nombreux effets secondaires destructeurs de l’antibiothérapie sous laquelle il a dû être placé.

Persuadé de pouvoir être guéri par une médecine qui est à la pointe de la technologie, Phakyab Rinpoché a dû se rendre à l’évidence des lacunes de notre médecine, qui n’a finalement qu’une approche matérielle du corps et des maladies.
Son entrainement spirituel, basé sur les nombreux enseignements qu’il a reçu au cours de sa formation monastique l’ont ainsi guidé vers une guérison totale, après 3 ans de pratique méditative intense et de yogas de l'énergie interne.

Par ce témoignage, il vise à faire prendre conscience de l’existence d’une énergie subtile, guidée par l’esprit et qui est capable, après avoir été stabilisée et préparée, de guérir le corps physique.

Que le lecteur ne s’attende évidemment pas à trouver dans ce livre un protocole de guérison à suivre. Ce serait de toute façon incompréhensible aux non-initiés.
Concernant les pratiques de guérison, ce sont la foi dans les enseignements et la dévotion au maître qui les a transmises qui les rendent opérantes. Et le karma du pratiquant est également un acteur essentiel de la guérison.


Les enseignements qui mènent à l’éveil, les yogas de l’énergie interne sont secrets, car ils doivent être transmis par un maître ayant lui-même un esprit mûri par l’expérience. Celui qui reçoit ce type d’enseignements doit avoir un esprit stable, apaisé et préparé à recevoir cela, sinon sa compréhension ne serait qu’intellectuelle. («  Intellectuellement, on ne comprend que l’écorce de la pratique. Le fruit ne nous est pas donné. »)


Pour finir, Phakyab Rinpoché explique que le bouddhisme n’est pas la seule voie de guérison. C’est à chacun, en fonction de sa sensibilité et son degré de conscience, de trouver son chemin spirituel, suivant sa religion et sa culture.
Il faut aussi signaler que les lamas tibétains ne disent pas qu'il faut refuser les soins de la médecine occidentale, mais simplement de choisir les traitements les plus pertinents en fonction de chaque cas. Les pratiques de guérisons qu'ils proposent ont pour but de potentialiser l'effet des traitements médicaux.


Voici quelques citations extraites du livre:


*«  Même si le Bouddha n’est pas présent, ceux dont l’esprit est sain entendent le ciel, les montagnes et les arbres enseigner le Dharma. Les chercheurs de vérité à l’esprit pur verront surgir le Dharma par la seule force  de leurs prières d’aspiration. » 


(Le Dharma ce sont les enseignements de Bouddha, et aussi le chemin) 


* "J’ai compris alors à quel point il est important de relativiser ses souffrances et de ne pas s’enfermer dans un passé douloureux, ce qui prolonge indéfiniment le calvaire subi. On devient alors son propre bourreau. »



* Naître et mourir se touchent. Le début et la fin de la vie, opposés en apparence, forment une continuité d’événements de conscience. Tel est le mouvement de la roue du temps affectant tout ce qui apparaît dans l’univers, du grain de sable aux galaxies, de l’infiniment petit à l’infiniment grand. 



*     «  La vraie conquête de l’espace est celle de l’espace intérieur qui contient tous les mondes. Toute autre conquête, d’ordre matériel, est une illusion. »