L’histoire est celle d’un prêtre, certes, mais le fond ne
traite pas de religion. C’est la vie d’un homme, Mathieu, qui aura employé
toute son existence à se trouver lui-même.
Il se souvient, et raconte. Son enfance, ses parents, sa
scolarité, ses amis, sa carrière ecclésiastique…
Mathieu est quelqu’un de très sociable, jovial, agréable
et avenant. Tout le monde ou presque, l’apprécie. Mais c’est aussi un être
tourmenté, qui a peur de l’échec, peur de mal faire, de décevoir, il est
indécis et ne trouve pas sa place dans cette vie.
Son besoin incessant de plaire et d’être aimé le pousse à
cacher ses failles et l’empêche de s’affirmer.
J’ai trouvé le début du récit assez lent, ce qui m’a
ennuyée, mais je me suis ensuite attachée au jeune breton, à ses souvenirs, à
sa vie. L’intérêt du roman n’est pas dans la dynamique, car il ne se passe pas
vraiment d’évènements surprenants, haletants, passionnants. Non, l’intérêt du
roman réside dans sa lenteur et sa profondeur.
Isabelle Pirot prend le temps de creuser le personnage
principal, mais aussi ceux qui auront marqué son existence.
Je salue d’ailleurs son travail d’écriture, que j’ai
trouvé remarquable. Elle a mené une analyse de la conscience et des
comportements humains, et soit dit en passant, elle n’est pas toujours tendre
envers le monde ecclésiastique et dénonce les conventions sociales, plus
marquées dans le domaine religieux, un domaine souvent rigide et très codifié.
Une histoire attachante, sensible et profondément
humaine.
Quelques extraits du livre:
* - Un jour, après une mise au point, et quand j'dis une
mise au point, c'était plutôt la grosse chicane, le fils se met à crier :
" Foutez-moi la paix, j'veux être libre!"
Ah Sainte Vierge, j'ai vu l'moment où son père allait
l'écrabouiller! V'là qu'i'prend sa voix des profondeurs, j'l'entends encore :
" Libre? Monsieur veut se donner d'l'air et voler de ses propres ailes? Eh
ben, il a qu'à s'faire une malle à quat'noeuds et ficher l'camp!"
- Une quoi?
- Quoi une quoi? Un balluchon, quoi! Vous comprenez plus
l'français?
* Nul n'offensa le Seigneur comme le fit l’Église. Par ses
prises de position, par les supplices qu'elle infligea, par son langage et son
interprétation du Verbe, elle truqua la vérité, meurtrit l'innocence, camoufla
la parole révélée, faussa l'amour divin.
* Si le grain ne meurt, il reste seul.... Intact, mais
sec.
Au contraire, s'il meurt, il deviendra germe et puis
moisson...
* Qu'un homme éminent dont j'admirais la sagesse se fût
attaché à moi jusqu'à me faire comprendre qu'il avait souffert de mon absence,
j'avais peine à le croire. J'eus même la vulgarité de penser que Léonard
devenait vieux et que sa solitude lui pesait. Me méprisais-je à ce point ?
Ceux que j'appelais mes amis, pourquoi étais-je intimidé
qu'ils me reconnussent comme tels? Et dans ce cas, ne pouvais-je m'imaginer
leur avoir manqué? Ignorais-je tout de l'amitié? " Ils m'aiment
vraiment..." me répétais-je en marchant.
* On ne peut pas dominer l'autre, l'asservir au nom de
Dieu et prétendre se faire aimer.
" Vous, pauv'ouailles, ignares, tiraillés par
l'angoisse d'être mortels, obéissez, laissez nous faire, nous saurons vous
conduire à Dieu... "
l'histoire d'une vie, nul besoin de 'broder' pour rendre le récit plus accrocheur,
RépondreSupprimerLe drame de la religion mal comprise, manipulée...
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